L'enfance

III

L'ENFANCE

 

Monsieur Victor Simon est né à Carnières la 22 mars 1888. Sa maison natale existe toujours au n° 56 de la rue Ferrer.
Il était le dernier d'une famille de cinq enfants. Son père était ouvrier de surface dans un charbonnage. Sa mère, née Léonard Marie-Catherine est décédée le 3 février 1894 ; à l'âge de six ans, le petit Victor est donc orphelin de mère. Privé si jeune de la tendresse maternelle, il éprouve une profonde déception lorsque son père se remarie quelques années plus tard. L'enfant ne trouve plus au foyer le milieu affectueux et la bonne entente qu'il y a connus. Dès lors, il va s'en détacher peu à peu et, par la force des choses, il va devoir se « débrouiller » par ses propres moyens, ce qui ne sera pas sans exercer une grande influence, en les développant, sur ses dons innés de chercheur.
L'école ? Pas question ou si peu... N'oublions pas qu'à cette époque, l'instruction n'est pas obligatoire ; elle ne le sera d'ailleurs qu'en 1914, si invraisemblable que la chose nous paraisse à présent !
Les dirigeants d'alors professaient qu'obliger les enfants à fréquenter l'école constituait une atteinte à la liberté du père de famille ; que celui-ci voyait ses ressources augmentées par le travail de ses enfants et que, par conséquent, il n'aurait pas tendance à réclamer d'augmentation de salaire ni, le cas échéant, de recourir à la grève. « Nous serions sans défense, déclarait un leader politique (à propos de la réglementation du travail des enfants) contre le langage que nous tiendrait l'ouvrier, nous réclamant du travail et du pain en s'appuyant sur la détresse des siens ». Il n'y a pas, pour les politiciens d'alors, de « question sociale ».
Toujours est-il que le petit Victor commence une vie de labeur pénible en travaillant, jusqu'à l'âge de 10 ans, comme porteur de briques. Cela nous paraît effarant, considéré sous l'angle de nos conceptions actuelles. Et cependant, il a fallu de longues années de lutte pour faire cesser ce scandale de jeunes garçons et de fillettes astreints, dès leur plus jeune âge, à des travaux souvent longs, durs et pénibles. L'annexe n° 1 donne quelques détails sur les conditions de vie du monde du travail à cette époque. Rappelons simplement qu'en 1860, les usines textiles anglaises employaient des enfants de 8 ans pendant 14 heures par jour ; l'une des premières conquêtes sociales fut la limitation à 10 heures par jour de la durée du travail en usine des enfants de moins de 14 ans ! La situation n'était pas plus brillante chez nous !
Ce rappel de l'évolution sociale à la fin du XIXe siècle n'a d'autre but que d'éclairer le cadre dans lequel Victor Simon va faire son pénible apprentissage. Jusqu'à l'âge de 10 ans, à part quelques maigres fréquentations scolaires, il a donc été aide-briquetier. C'est alors que se rendant compte de son manque quasi total d'instruction, il reprend le chemin de l'école. Il n'a pas gardé un souvenir très heureux de cet écolage ; mais néanmoins, en deux ans et sans grand effort, il acquiert une base qui, bien que faible, pourra être développée ultérieurement par un travail personnel opiniâtre, lui permettant d'entreprendre des études techniques fort poussées et d'y enregistrer de beaux succès. Il faut y voir l'origine de sa carrière, marquée déjà par son goût inné pour la mécanique, la recherche et l'invention.

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