En octobre 1914, au moment où le siège
de la Position fortifiée d'Anvers entre dans sa phase finale
et où, par conséquent, les travaux d'électrification
du fort de Vieux-Dieu prennent fin, Victor Simon décide
de contracter un engagement volontaire pour la durée de
la guerre. Il avait été libéré du
service militaire, ayant tiré un bon « numéro
» au tirage au sort en 1908. Lorsque la capitulation fut
imminente, il accompagna l'Armée dans sa retraite vers
l'ouest et, par Ostende et La Panne, il fut évacué
sur Dunkerque et, de là, sur Le Havre ; il est toujours
en civil, n'ayant encore pu être équipé. Il
gagne finalement la camp d'Auvours pour y être instruit.
Fin mai 1915, il arrive à La Panne et est désigné
pour un service spécial rattaché au Génie
; il s'agit d'une unité de projecteurs de tranchée.
Cantonné à Steenkerke, il est engagé dans
le secteur de Dixmude, dont la réputation est bien connue.
Il dessert la grand-garde d'Oud-Stuyvekenskerke, qu'on ne peut
atteindre que la nuit et après un long trajet par les passerelles
jetées sur l'inondation. Cette grand-garde est un des plus
mauvais coins du front, bombardée presque sans arrêt
et rendue célèbre par le Père Lekeu qui y
a installé un observatoire d'artillerie dans les ruines
du clocher et des quelques maisons avoisinantes. Les pertes y
sont fort élevées, comme d'ailleurs au fameux «
Boyau de la Mort », tout proche, et où Victor Simon
s'est rendu à plusieurs reprises avec ses hommes (il a
en effet été nommé caporal au camp d'Auvours).
Le 29 mai 1916, il se trouve en première ligne à
Dixmude et est occupé à installer un projecteur
de 30 centimètres alimenté par un groupe moteur-dynamo
à essence, lorsqu'il est atteint de plein fouet par une
balle allemande. Transporté aussitôt à l'hôpital
militaire de l'Océan à La Panne, sa blessure est
jugée très grave et le Colonel-Médecin Depage,
assisté du Docteur Alexis Carrel, le fameux chirurgien
et physiologiste français, estime que l'extraction de la
balle qui a perforé le poumon droit, présenterait
des risques trop grands et c'est ainsi que Victor Simon garde
toujours en soi-même, comme souvenir, un pruneau boche !
Une fois guéri, il est évidemment déclaré
inapte au service en campagne et, sur sa demande, il est affecte
à une unité de T.S.F. stationnée à
Calais. Le secteur n'est pas de tout repos et Victor Simon garde
le souvenir de quelques bombardements où il se fit «
sonner » dangereusement. Il en est ainsi le 17 juillet 1917
lors de l'incendie de son cantonnement, une filature désaffectées
rue de la Pomme d'Or ; il risque d'être brûlé
vif (un de ses camarades le fut).
Ce séjour lui laisse toutefois du temps libre ; il se lance,
pour utiliser ses loisirs, dans la fabrication de bagues en aluminium
provenant de têtes d'obus allemands ; les soldats partant
en permission sont friands de ces bagues, qui constituent de petits
cadeaux très appréciés à l'arrière
et surtout par les « marraines de guerre ». Aussi,
son petit commerce prospérant, il y apporte bientôt
des perfectionnements et il passe à la fabrication de bagues
en ébonite avec plaquette en argent pour le prix de 5 francs,
ou en or, pour 20 francs ; l'or est importé d'Angleterre,
en livres, par les clients eux-mêmes ! Ses bénéfices
lui permettent d'améliorer sensiblement son ordinaire.
Nous voyons que les circonstances réveillent en lui l'aptitude
à se « débrouiller ». Il n'en reste
d'ailleurs pas là et c'est ainsi qu'il s'emploie à
rétablir l'éclairage en ville ; pour s'entretenir
la main, il rebobine un stator de moteur, en le faisant passer
de 130 à 220 V ; à l'atelier de T. S. F., il est
chargé de la mécanique et en général
de tous les travaux exigeant une main experte et adroite.
A la fin de la guerre, il est démobilisé à
Forest, vers la mi-juin 1919 ; il a 31 ans.
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